Catégorie : Littérature générale

Les jours heureux ne s’oublient pas de Gavin’s Clemente Ruiz

Résumé

Lorsqu’il débarque en Espagne, où son père est censé avoir refait sa vie, Gontran découvre un veuf esseulé, écrasé par le poids des souvenirs et du chagrin. Le fils décide d’aider le père. Mais comment le soutenir et combler le vide laissé par la femme qui rendait à l’un et à l’autre la vie si extraordinaire ?

L’avis de Cassandre

Gontran, marié et papa d’un adolescent prénommé Léo a presque tout pour être heureux. Presque, car il y a six ans, sa mère est décédée, laissant un manque immense. Quant à son père, depuis le décès, leurs liens se sont distendus. Lorsque Gontran reçoit un appel lui indiquant que la santé de son père est inquiétante, il prend le premier avion en partance pour l’Espagne. Dès son arrivée, leurs rapports sont immédiatement conflictuels. Ils ne se comprennent pas et ne semblent pas avoir grand chose en commun…

J’ai été surprise de lire ce roman aussi vite, presque sans prendre le temps de respirer ! L’écriture de Gavin’s Clemente Ruiz est très prenante, les chapitres défilent à toute allure. J’ai été touchée par les thèmes abordés : les rapports père-fils, le deuil, le poids des non-dits. Le père de Gontran est difficilement appréciable de prime abord : il est casanier, bourru, ne fait pas beaucoup d’efforts. Gontran a le sentiment de n’avoir aucun point commun avec lui, et pourtant… Sous ses airs d’ours mal léché, son père pourrait bien dissimuler de profonds sentiments. Le problème est qu’il ne sait pas les verbaliser.

Avec ce roman, vous allez rire, sourire, être ému (et peut-être pleurer ?). Derrière un humour certain et des tirades dignes de punchlines, se cachent de réels questionnement. Pourquoi craint-on de ressembler à ses parents ? Que sait-on vraiment d’eux, eux qui savent (presque) tout de nous ? Pourquoi est-ce si difficile de parler d’amour ? En bref : un roman qui fait beaucoup de bien.

Les jours heureux ne s’oublient pas de Gavin’s Clemente Ruiz, paru en avril 2023 aux éditions Albin Michel, 18,90€

Elle m’avait dit : « Lis. Tu comprendras quand tu seras grand. » Aujourd’hui je comprends, mais il est trop tard.

Elle a tes yeux mon amour de Typhanie Moiny

Résumé

La vie d’Amandine, 34 ans, est bouleversée à la mort d’Olivier, son compagnon. Il emporte avec lui leur dernier espoir de fonder une famille.
Seuls restent la peine, les regrets et le souvenir de cet homme plus âgé et bienveillant. Amandine tente de survivre au deuil comme elle le peut lorsqu’elle fait la connaissance de Mathilde, fi le du défunt, de douze ans sa cadette, qu’elle croise pour la première fois aux funérailles d’Olivier. Un caractère de cochon, mais les yeux de son père.
À chaque rencontre, des étincelles. Et pourtant, ces deux femmes devront apprendre à communiquer car, bien qu’elles ne le sachent pas encore, elles sont liées… et pas au bout de leurs surprises !

L’avis de Cassandre

Quand j’ai envie de me faire du bien avec un roman, c’est souvent vers la collection Instants suspendus que je me tourne. C’est clairement une valeur sûre !

Amandine est une trentenaire qui vit une histoire d’amour forte avec Olivier, un papa divorcé plus âgé qu’elle. Leur relation n’est pas facile, elle n’a jamais pu rencontrer ses grands enfants, a le sentiment de vivre un peu dans l’ombre de son ex-femme et surtout, elle souhaite un enfant et pas lui. Mais nos deux protagonistes s’aiment et sont prêts à affronter bien des tempêtes ensemble. Celle qu’Amandine n’avait pas prévu, c’est le décès brutal d’Olivier. Le monde de notre héroïne s’effondre. Elle a tout perdu et va devoir apprendre à se reconstruire.

Ce roman n’est pas facile et aborde le douloureux sujet du deuil : le choc, l’injustice, l’incompréhension, la colère et puis, l’acceptation. J’ai adoré le personnage d’Amandine, je l’ai trouvée tellement humaine. Elle est à la fois simple, franche, aimante et souvent drôle à ses dépens. Beaucoup peuvent se reconnaître à travers cette héroïne attachante. Sa famille est clairement azimutée, surtout les femmes qui n’ont aucun filtre ! Les personnages secondaires apportent un vent de fraîcheur à l’histoire et nous amusent beaucoup.

L’intrigue n’est pas forcément très surprenante mais j’ai pris beaucoup de plaisir à lire ce roman. Pour conclure, Typhanie Moiny parvient à aborder un sujet difficile et à faire du bien à ses lecteurs dans un seul roman. Pari réussi !

Elle a tes yeux mon amour de Typhanie Moiny, paru en février 2023 aux éditions L’Archipel, 400 pages, 20€

Tu devrais manger davantage, Amandine ! Tu es sec comme un haricot et blanche comme un cul de Parisien sur la plage le premier jour des congés payés.

Partir quand même de Yiyun Li

Résumé

À quatre-vingt-un ans, Lilia a enterré trois maris, élevé cinq enfants et vu naître dix-sept petits-enfants. L’heure est venue de vivre un peu pour elle. Et de se plonger dans un livre qui l’intrigue : le journal d’un certain Roland Bouley, un auteur resté obscur mais qui occupe une place particulière dans son existence.
 
Et pour cause, Lilia l’a connu en 1945, quand Roland était vaguement en poste aux Nations unies. Quand ce séducteur invétéré papillonnait de l’une à l’autre en promettant le mariage à toutes. Quand Lilia vivait dans une ferme avec son père veuf et ses nombreux frères et sœurs. Elle avait seize ans, elle était vive et délurée. Elle voulait échapper à sa vie, et Roland est arrivé.
 
Aujourd’hui, Lilia est curieuse de découvrir le journal de celui qu’elle n’a jamais oublié. De découvrir aussi ce que ce journal dit de sa vie à elle, de la vie qu’ils auraient pu avoir et de la vie qu’elle a menée, malgré tout…

L’avis de Cassandre

Lilia est la narratrice du roman. Cette vieille dame fait aujourd’hui le bilan de sa vie et se concentre sur deux personnes qui l’ont marquée : Roland, celui avec qui elle a eu une aventure amoureuse à l’âge de seize ans et qui ignorait qu’elle était tombée enceinte à son départ. Et il y a Lucy, leur fille qu’elle a élevée avec Gilbert, son mari et qui s’est suicidée à l’âge de 28 ans.

Lilia porte un regard lucide sur sa vie et sur ceux qui l’ont entourée. J’ai été très touchée par la plume de Yiyun Li et ses mots extrêmement justes. Elle parle d’amour, de désir, de famille, du lien mère/enfant (et surtout mère/fille) et de nombreux autres sujets encore.

En revanche, j’ai été moins convaincue par l’histoire, qui reste assez plate. Dans ce livre, nous oscillons entre les extraits de journal intime de Roland, publié à sa mort et les commentaires de Lilia. J’ai trouvé certains passages assez longuets et j’attendais un sursaut qui n’est pas venu.

Pour conclure, un récit en demi-teinte qui m’a toutefois fait découvrir une très belle plume.

Partir quand même de Yiyun Li, paru en février 2023 aux éditions Belfond, 368 pages, 22€

Voici une leçon : ne devenez pas victime du comportement négligent des autres. Si quelqu’un est déterminé à vous faire du mal ou à vous détruire, vous devez au moins le respecter. Mais le plus souvent, les gens vous font du mal par étourderie. Ils vous bousculent, ils vous poussent, parce qu’il ne leur vient jamais à l’idée que vous puissiez exister dans cet espace-là.

La petite boutique aux poisons de Sarah Penner

Résumé

« Je jure solennellement devant Dieu, Créateur de toutes choses, de ne jamais administrer de poisons… » A ce serment prêté jadis par les apothicaires, Nella ne souscrit plus depuis longtemps. Belladone, ellébore, arsenic : on peut se procurer toutes sortes de poisons dans sa boutique du 3, Back Alley – à condition qu’un homme violent en soit la victime… Et il y en beaucoup, des hommes violents, dans le Londres de 1791…
Deux siècles plus tard, une mystérieuse petite fiole ressurgit dans la boue de la Tamise aux pieds de Caroline, une Américaine au cœur brisé. Et avec elle, toute une histoire de femmes, trop longtemps oubliée…

L’avis de Cassandre

J’ai entendu beaucoup de bien de ce roman depuis sa parution en grand format. Avec une aussi jolie couverture et un titre prometteur, difficile pour moi de ne pas craquer !

Nous suivons deux femmes, à deux époques différentes et de manière alternée. D’une part, il y a Nella, une apothicaire qui vit à Londres en 1791. Sa spécialité ? Empoisonner les hommes sur demandes des femmes, en toute discrétion. D’autre part, nous rencontrons Caroline, une Américaine en séjour à Londres. Son histoire d’amour de dix ans semble se terminer d’une manière assez brutale. En balade, elle trouve une fiole, rejetée par la Tamise. Celle-ci l’obsède : elle veut à tout prix découvrir son histoire.

Si vous me suivez depuis longtemps, vous savez que j’affectionne les romans mettant en scène des femmes et qui alternent les époques. La petite boutique aux poisons a fait mouche : je l’ai lu en une seule soirée et c’est assez rare pour être souligné. Les chapitres défilent rapidement et on a envie de connaître l’histoire unique de Nella. J’ai aimé les thématiques de l’apothicaire, des potions, des poisons mais aussi de la transmission. Sarah Penner parvient à captiver son lectorat avec une écriture fluide et addictive.

Pour conclure, un roman avec lequel j’ai passé un bon moment. Un premier roman prometteur !

La petite boutique aux poisons de Sarah Penner, paru en janvier 2023 aux éditions Pocket, 416 pages, 9€

L’automne est la dernière saison de Nasim Marashi

Résumé

Leyla, Shabaneh et Rodja se sont rencontrées sur les bancs de l’université à Téhéran. Soudées par un lien indéfectible, elles s’efforcent, envers et contre tout, de mener une vie libre. Leyla s’est mariée avec Misagh et a débuté une carrière de journaliste. Shabaneh est habitée par ses lectures et les souvenirs de la guerre. Rodja vient d’être acceptée en doctorat à Toulouse – il ne lui manque plus que son visa. Mais cet équilibre fragile vacille quand Misagh part seul pour le Canada.

En un été et un automne, entre espoirs et déconvenues, toutes trois affrontent leurs contradictions. Suffit-il de partir pour être libre ?

L’automne est la dernière saison est le reflet sensible et bouleversant de la société iranienne d’aujourd’hui. Une histoire prodigieuse et universelle d’amour et d’amitié.

L’avis de Cassandre

En premier lieu, je remercie sincèrement l’équipe de Kube et les éditions Zulma grâce à qui j’ai pu découvrir ce roman via une opération Book Club.

L’histoire se déroule en Iran et nous suivons alternativement, trois jeunes femmes et amies durant deux saisons seulement, l’été, puis l’automne. Leyla ouvre la marche. Son mari qu’elle aimait et adulait est parti pour le Canada. Elle n’a pas voulu le suivre, persuadée qu’il renoncerait à son départ pour elle. Depuis, son cœur est en miettes et elle déprime, n’a plus goût à rien. Shabaneh, quant à elle, est rêveuse, toujours la tête plongée dans un roman. Elle est ingénieure dans un cabinet. Arsalan est l’un de ses collègues de travail et souhaite l’épouser. Shabaneh est partagée, elle n’est pas sûre de l’aimer et se sent rapidement prise au piège. Cette femme m’a profondément émue. Elle porte sur elle le poids de nombreux malheurs et s’oublie elle-même. Elle s’occupe énormément de son frère, Mahan, atteint de handicap mental et dont leur mère ne tolère pas sa seule vue… Enfin, il y a Rodja, celle qui s’est inscrite en Doctorat en France et qui a fait une demande de visa étudiant. Une démarque bien plus ardue qu’il n’y paraît.

J’ai été touchée par ce récit choral porté par des femmes. Nasim Marashi parvient à nous faire ressentir le poids du régime iranien en ne l’évoquant jamais clairement. Elle mentionne juste un bombardement. Elle réussit à nous en faire prendre conscience dans l’ambiance générale du roman. Les femmes conduisent, étudient, travaillent mais il y a un tel fossé avec les hommes iraniens. Elles sont hautement diplômées mais occupent des postes nettement inférieurs à ceux des hommes. On ressent aussi le poids des traditions, le mariage, la famille, du qu’en dira-t-on. Et puis, il y a la censure, celle du journal dans lequel travaille Leyla, tel un miroir à l’auto-censure de Nasim Marashi lorsqu’elle a écrit son roman.

Ces trois femmes évoluent en quelques mois. Durant l’été (première partie), elles sont en proie aux doutes, aux hésitations, aux rêves avortés et aux désillusions. On ressent une profonde tristesse, une mélancolie voire même une forme de résignation. A l’automne, elles ont mûri, fait des choix et deviennent maîtresses de leur propre destin, dans une mesure toute relative.

Pour conclure, ce roman est une très belle découverte et un portrait réaliste de la jeunesse iranienne tiraillée par l’envie de partir et par la peur de tout quitter.

L’automne est la dernière saison de Nasim Marashi, paru en janvier 2023 aux éditions Zulma, 272 pages, 22€

J’en ai assez d’hésiter. D’avoir peur, d’être indécise, de trancher, de toujours me sentir coupable. De ne pas arriver à décider pour moi-même comme tout le monde. J’aimerais être Madame de Barry et que Louis XV m’épouse. Je serais bien obligée de lui obéir, c’est le roi, et personne ne s’y opposerait. Même pas moi.

Les manquants de Marie-Eve Lacasse

Résumé

Thomas est parti. Ça fait déjà deux ans. On ne sait pas où. On ne sait ni pourquoi, ni avec qui. On ne sait rien. Et de ce rien il faut bien faire quelque chose. Alerter la police ou non. En parler ou se taire. Rendre cette histoire réelle ou pas. Faire avec. Inventer un récit. Convoquer le fantôme. Vivre avec lui. Ou bien le faire sortir par la porte. L’oublier jusqu’à ce qu’il revienne en rêve. Par la fenêtre. Par la forêt. Par ce détail ou cet objet qui rappelle sa mémoire, sans cesse. Et puis un jour, Claire, sa femme, Joan et Hélène, ses amies, sont convoquées au commissariat. C’est qu’il y a quelque chose de louche autour de la disparition de Thomas Cassar. On ne disparaît pas comme ça. Il y a toujours quelque chose. Il y a toujours quelqu’un.

L’avis de Cassandre

Babelio m’a proposé de recevoir Les manquants dans le cadre d’une opération Masse Critique privilégiée (merci infiniment ainsi qu’aux éditions Seuil). Ce n’est pas le genre de roman que je lis habituellement et c’est pourquoi j’ai accepté, j’aime sortir des sentiers battus et faire des découvertes.

Claire est mariée depuis vingt ans à Thomas et mère de deux grands enfants. L’image de la famille parfaite se ternit quand Thomas part, sans rien laisser derrière lui. Pourquoi ? Est-il encore en vie ? Si oui, où est-il ? Tant de questions restées sans réponses. La vie de Claire est en suspens. Deux ans plus tard, Claire est conviée au commissariat de police pour répondre à des questions.

Les manquants est un roman choral où les chapitres alternent trois voix de femmes : Claire et ses amies d’enfance, Hélène et Joan. Chacune se livre dans un monologue, pas toujours linéaire. Elles racontent leurs études, leur amitié, le mariage de Claire et Thomas mais aussi leur vie intime, ce qui les a façonnées. On en oublierait parfois presque la disparition de Thomas, tant elles ont à raconter. J’ai apprécié le style d’écriture, très « parlé » et la narration sous forme de monologue. Il ne s’agit pas réellement d’un interrogatoire de police mais bien d’une confession à cœur ouvert.

J’ai trouvé ce roman surprenant dans son choix narratif, c’est le premier point positif à mes yeux. J’ai aussi apprécié l’atmosphère lourde, pesante, annonciatrice de la catastrophe à venir. Un ouvrage captivant et surprenant, une plume à découvrir !

Les manquants de Marie-Eve Lacasse, paru en mars 2023 aux éditions Seuil, 256 pages, 19€

Chamanes de Sébastien Baud et Corine Sombrun

Résumé

Depuis la nuit des temps, les chamanes nous fascinent. Qui sont-ils ? Quel est leur rôle ? Quels sont leurs outils ? Des premiers récits de la rencontre aux histoires de chamanes d’aujourd’hui, l’ethnologue Sébastien Baud explore les liens entre visible et invisible, humain et animal, culture et nature, tels que les sociétés à chamanes les conçoivent. Corine Sombrun, quant à elle, nous présente la recherche passionnante des liens entre transe et neurosciences.

L’avis de Cassandre

J’aime lire pour différentes raisons : envie d’évasion, évacuer mon stress quotidien, ressentir mille émotions mais parfois aussi pour me cultiver et apprendre de nouvelles choses. Avec une couverture aussi jolie et un titre très prometteur, difficile de ne pas craquer. Sébastien Baud, ethnologue et chercheur accompagné de Corine Sombrun, cofondatrice du TranceScience Research Institute nous offrent un ouvrage hautement documenté. Vous y découvrirez les origines du chamanisme, leur rôle, leurs manières d’agir, également. Les chapitres sont thématiques et s’appuient sur des éléments factuels. J’ai aimé trouver des photographies et illustrations à de multiples reprises.

J’ai trouvé l’histoire des chamanes fascinante. Ces sages à la fois thérapeutes, guérisseurs, conseillers et voyants sont les intermédiaires entre le monde visible et invisible. Leurs liens avec la nature et l’invisible me captivent. Enfin, j’ai aimé la dernière partie consacrée au chamanisme d’aujourd’hui qui bouscule nos certitudes.

Pour conclure, il s’agit d’une vraie mine d’information qui m’aura donné envie d’en savoir… encore plus !

Chamanes de Sébastien Baud et Corine Sombrun, paru en janvier 2023 aux éditions Michel Lafon, 235 pages, 7,20€

A tout jamais de Colleen Hoover

Résumé

Lily, depuis que sa fille Emerson est née, lui a promis que le cycle de la violence s’arrêterait avec elles. Que jamais plus, les femmes de leur famille n’endureraient des abus. Alors elle a pris la décision de quitter son mari et père de sa petite fille. Elle ne s’attendait pas à croiser Atlas, son amour d’adolescente par hasard, et elle ne sait pas quelle place il pourrait occuper dans sa vie. A-telle seulement envie de le revoir ? D’avoir à nouveau une vie sentimentale ? De recommencer sa vie et de croire à l’amour éternel, elle qui a appris de la plus dure des façons qu’il était bien difficile à trouver. Atlas n’est plus du tout le même que l’adolescent en perdition qu’elle a connu. Il a un restaurant, a passé de longues années loin d’elle. Leur histoire peut-elle recommencer là où elle s’était arrêtée ?

L’avis de Cassandre

Dire que j’ai adoré Jamais plus, le premier opus de la duologie, serait un euphémisme. Cette histoire m’avait profondément touchée et j’étais ravie d’apprendre que Colleen Hoover écrivait une suite.

J’ai retrouvé Lily, aujourd’hui divorcée et maman de la petite Emerson qui a déjà bien grandi. Elle a un accord à l’amiable avec Ryle, son ex-mari pour se partager la garde de l’enfant. Elle reste malgré tout sur ses gardes, elle ne se sent pas à l’abri d’un nouvel accès de colère. En parallèle, nous retrouvons Atlas, l’amour de jeunesse de Lily. Leur histoire reprend là où on l’a laissée dans Jamais plus, pour notre plus grand bonheur.

J’ai adoré les protagonistes de l’histoire et en particulier, de découvrir le point de vue d’Atlas. J’ai été touchée par cet homme qui s’est retrouvé dans le dénuement le plus total et qui a su rebondir et avancer. Le mal que lui a fait sa famille m’a fait froid dans le dos. Lily, quant à elle, a connu la violence sous différentes formes. Aujourd’hui, on espère que ces souffrances sont derrière eux et qu’ils pourront enfin être heureux et vivre sereinement.

Cette duologie n’est pas facile à lire, les thématiques sont dures et peuvent heurter les plus sensibles. Pourtant, Colleen Hoover trouve les mots justes pour nous faire réagir et nous alerter sur les violences conjugales et familiales. Elle retranscrit avec réalisme l’emprise sous laquelle sont les victimes.

Pour conclure, cette duologie m’a émue et ébranlée. J’ai adoré les personnages principaux et la romance, bien entendu. Préparez vos mouchoirs, vous risquez de verser quelques larmes !

A tout jamais de Colleen Hoover, paru en janvier 2023 aux éditions Hugo Publishing, 384 pages, 18,50€

Les mauvaises épouses de Zoé Brisby

Résumé

Summer ira peut-être en enfer mais elle ira avec Charlie…

Las Vegas, 1952 : Elvis, Marilyn, l’Amérique en pleine guerre froide. Summer et son mari vivent dans le désert du Nevada une base militaire chargée d’étudier la bombe atomique. A chaque lancer, ils sont aux premières loges et il n’y a que Summer pour ne pas savourer le spectacle. En bonne épouse, elle joue le jeu et organise des apéritifs atomiques. Sa docilité volera en éclat avec l’arrivée d’une autre bombe sur la base, Charlie. Elle est tout ce que Summer n’est pas : forte, indépendante et sensuelle… Tandis que les hommes s’extasient sur le miracle de la science et la puissance de l’Amérique, Summer et Charlie décident de prendre en main leur destin.

L’avis de Cassandre

L’histoire se déroule à Artemisia Lane, banlieue de Las Vegas, en 1952. Plusieurs familles américaines vivent sur une base militaire. A quelques kilomètres de là, les hommes réalisent des essais nucléaires en plein désert du Nevada pendant que leurs parfaites épouses leur concoctent de bons petits plats. Les week-end, on organise des barbecues et on observe les explosions, toujours plus impressionnantes. Plus le temps passe et plus Summer, la femme d’Edward, un haut gradé, s’inquiète de ces essais nucléaires. Quand Charlie, une femme sensuelle (et que chacun juge comme vulgaire) s’installe à Artemisia Lane, le quotidien de Summer se retrouve bouleversé à tout jamais.

Je ne pensais pas lire ce roman presque d’une seule traite. J’ai trouvé l’histoire captivante et l’immersion s’est faite dès les premières pages. J’ai aimé Summer, une femme passive, effacée, qui vit à travers son mari et qui va peu à peu s’émanciper. A l’inverse, Charlie n’a pas peur de grand chose, même pas des coups de son mari. Elle n’a que faire des jugements des autres, elle fume, elle conduit et porte des escarpins rouges. Si tout les oppose, le coup de cœur est pourtant presque immédiat. Charlie exerce une véritable force magnétique sur Summer, et vice-versa. Où les conduira leur soif de liberté ?

En plus de personnages attachants et captivants, j’ai aimé le côté historique du récit. Ces essais nucléaires sont un véritable scandale. Les deux femmes visitent d’ailleurs la « ville-test » située à proximité des explosions. Les maisons sont construites à l’identique que celles dans lesquelles vivent nos héroïnes et habitées par des mannequins qui fondent rapidement sous la chaleur et la radioactivité. C’est l’une des images les plus marquantes à mes yeux. Charlie et Summer semblent vivre dans un décor en carton-pâte, presque en huis clos, tellement loin de la civilisation. Je me suis sentie oppressée et mal à l’aise. En plus de cela, elles sont réduites au simple statut d’épouses ou de mères dans une société totalement patriarcale.

Ce roman est pour moi un coup de cœur, à la fois pour ses thématiques que pour la relation sulfureuse entre les deux femmes. En tant que lecteur, on assiste aux premières loges d’un drame en devenir. J’ai été conquise par l’écriture de Zoé Brisby, il s’agissait de mon tout premier roman de l’écrivaine.

Les mauvaises épouses de Zoé Brisby, paru en mars 2023 aux éditions Albin Michel, 336 pages, 20,90€

Quatre heures, vingt-deux minutes et dix-huit secondes de Lionel Shriver

Résumé

Pathétique… Quand Remington, la soixantaine, annonce à sa femme son ambition de courir le marathon, Serenata n’en revient pas. Lui qui n’a jamais couru plus de dix mètres de la chambre au salon… Est-ce la peur de vieillir ? L’oisiveté de sa retraite forcée ? Peut-être la silhouette très pneumatique de Bambi, sa nouvelle coach ? Ou bien tout simplement le conformisme, ce culte du corps, de la performance, qui règne sur l’époque ? Las, la résolution de Remington n’a rien d’une lubie et leur couple s’essouffle.
Chronique d’une vie conjugale en bout de course…

L’avis de Cassandre

Après l’excellent A prendre ou à laisser, je poursuis ma découverte de la talentueuse Lionel Shriver avec ce roman au titre intriguant.

Serenata et Remington sont sexagénaires et mariés depuis des décennies. Serenata prête sa voix aux personnages de livres audio et de jeux vidéos et a toujours été une grande sportive. Elle a longtemps perçu le sport comme une véritable religion. Ses excès lui ont causé des dommages irréversibles au niveau des genoux. Forcée de troquer ses baskets contre des chaussons, elle repousse le plus possible l’opération et rumine dans son coin. Remington, quant à lui, vient d’être licencié de son emploi au service des transports. Compte-tenu de son âge, il doute sincèrement de retrouver un travail un jour. Pour occuper son temps libre, il lui prend une nouvelle lubie : courir un marathon alors qu’il n’a jamais pratiqué aucun sport. Aigrie par son handicap récent, Serenata ne le prend pas au sérieux puis, voyant qu’il persiste, lui en veut franchement de lui « voler son loisir ».

Dès les premières lignes, j’ai été happée par l’écriture de Lionel Shriver. J’ai, à nouveau, plongé au cœur d’un foyer qui menace d’imploser. La distance qui se creuse entre nos deux personnages est plus grande encore que les kilomètres avalés par Remington. J’ai apprécié cette thématique principale du sport en général, qui ne se limite pas à la course. Ce titre m’a fait réfléchir sur les dérives, car oui, on peut faire trop de sport. L’autrice évoque notamment le culte du corps, la quête perpétuelle du challenge, le fait de comptabiliser ses pas et le fait de sans cesse se comparer aux autres comme si notre vie en dépendait. Que veut-on réellement prouver et surtout, à qui ? Ne vous méprenez pas, ce roman ne parle pas uniquement de sport. Lionel Shriver aborde la vie de couple, la vie de famille (les grands enfants du couple sont parfaitement ingrats et perchés !) mais aussi la perception de la vieillesse et son acceptation.

J’ai pris beaucoup de plaisir à lire ce roman. L’écriture de Lionel Shriver est très corrosive. J’ai aimé ses personnages borderline aussi bien le couple central que ceux qui gravitent autour. Je note, en particulier, la fille du couple, endoctrinée et qui se réfère sans cesse à Dieu, Bambi, la coach qui ne connaît aucune limite et tous ces « malades » du sport. L’autrice parvient à nous faire rire et réfléchir en même temps. Un roman à ne pas manquer !

Quatre heures, vingt-deux minutes et dix-huit secondes de Lionel Shriver, paru en janvier 2023 aux éditions Pocket, 480 pages, 9,20€

Au bout du compte, il avait été décidé que les New-Yorkais n’étaient pas tout à fait prêts à se soumettre à l’autorité d’une voix de femme, et Serenata n’avait pas obtenu le poste. Comme le lui avait raconté Remington par la suite, après avoir réécouté son audition, un des membres de l’équipe avait déclaré qu’un passager écoutant cette voix sensuelle n’entendrait pas le message et qu’il envisagerait surtout de se faire le haut-parleur.

– C’est… carrément un Dieu.

– Crois-en mon expérience, il vaut mieux éviter de sortir avec un dieu. Ils finissent toujours par se révéler de simples mortels avec un faux-nez.